Je suis de la vieille école {revue de presse}
J’ai beau n’avoir que 30 ans, parfois je me sens à des années lumières de la société d’aujourd’hui. Difficile de se reconnaître sans ce monde où la logique ne l’est plus, où les normes ne sont pas ce qu’elles devraient être. D’ailleurs, première question que l’on pose en socio : « qu’est-ce que la norme ? »
Prenons Benoît Duquesne par exemple. Vendredi une copine s’indignait que ses contacts Facebook parlent uniquement de foot et de la défaite de la France alors que nous venions de perdre un grand journaliste. Pourquoi ? Peut-être parce que le journalisme ne fait plus rêver. Il n’y a pas si longtemps, dans ma génération, les enfants voulaient devenir professeur, vétérinaire ou encore pompier. Aujourd’hui ils souhaitent tous devenir des stars (parce que « star » est un métier, c’est bien connu). Pourtant les vedettes du ballon rond ou de la chanson existaient déjà, mais je ne sais pas, nous étions encore sensés à l’époque. Le pire du pire est que tout cela est encouragé par les médias. Zahia créatrice de mode à succès, Nabilla invitée à défiler par Gaultier et peut-être future co animatrice radio sur Europe 1, Ribéry qui ne sait pas aligner deux phrases correctement, Amélie de Secret Story qu’on rémunère 30 000€ pour gueuler dans les Anges. Bref, idiotie, argent, m’as-tu-vu, audimat. Reste-t-il encore de la place pour le vrai journalisme là-dedans ? Peut-être, mais alors en deuxième partie de soirée voire tard dans la nuit.
Il parait qu’il faut s’y faire, que c’est l’évolution. J’aurais plutôt tendance à parler de régression. Autre « évolution » : le contrat à horaires modulables. Qu’est-ce que c’est que cette chose ? Il s’agit d’un contrat de travail grâce auquel votre patron peut vous faire travailler plus que votre base contrat, mais sans vous rémunérer. Vous êtes remboursés en jours de récup’. Alors ce n’est pas nouveau, mais il tend à se généraliser dans certains corps de métiers, notamment dans les commerces. Certains y trouvent leur compte. De mon côté, j’y vois surtout le moyen de faire bosser ses employés à l’œil dans la plus grande légalité. Pour autant que je sache, les RTT n’ont jamais payé les factures. Ce qui me fait le plus enrager est que beaucoup de gens trouvent ça normal. « C’est comme ça Alex, faut s’y habituer. Soyons déjà heureux d’avoir un boulot de nos jours. » Mais… mais non quoi. Non, je ne peux me résigner à cela ! Insurgeons-nous, que diable. Alors quoi, s’ils décidaient de baisser nos salaires de 50% pour « relancer l’économie » on devrait répondre « amen » ? Non. Je suis de la vieille école, quand je travaille, j’aime être payée. Tout effort doit être récompensé. Déjà qu’on nous demande d’être de plus en plus diplômés alors que paradoxalement ils en tiennent de moins en moins compte dans la rémunération, non. Pas d’accord. D’ailleurs on ne s’y trompe pas, les entreprises qui chouchoutent leurs salariés ont un faible turn over.
En même temps depuis que l’on s’est replongé dans les histoires pour enfants avec l’arrivée de notre Lutin, on s’est rendu compte qu’on forge les petits à de nouvelles normes dès leur plus jeune âge. Avant, il y avait Père Castor, les Fables de La Fontaine ; mais ce temps-à est révolu. Aujourd’hui il y a Histoires du soir en 5 minutes. Vous vous souvenez du sketch de Florence Foresti sur les histoires gores que l’on raconte aux enfants ? Le lapin, le chasseur et le fusil ? Et bien c’est du Walt Disney comparé à ce bouquin acheté chez Nature & Découvertes.
Alors que nous mettions en place le cérémonial du coucher du Lutin (aussi connu des chers parents sous le nom de « rituel »), j’ai commencé à lui lire un conte pour l’apaiser. L’histoire ne commençait déjà pas très bien avec la mort du papa, mais ayant vu (et pleuré devant) le Roi lion, j’ai pensé que ça allait s’améliorer, qu’il y aurait une morale à la fin. Que nenni. En plus de grandir orphelins, les deux frères étaient aussi très pauvres et moqués par tous les habitants du village. Afin de rembourser la dette de feu papa, un dieu ordonna au frère cadet de tuer son aîné (donc la seule et unique famille qui lui reste !) en lui tranchant la tête. Ensuite, il l’enterra pour que pousse un cocotier et, en revendant les noix, il fit fortune et restaura l’honneur de sa famille décimée. Petit Lutin a 8 mois. A la réflexion, je me demande si ce n’est pas à partir de là qu’il a arrêté de faire ses nuits…
Non mais sans blague, vous trouvez ça normal de lire des histoires aussi glauques aux enfants ?! On se croirait dans la Famille Adams, il ne manque que les couteaux en guise de mobile au-dessus du lit. Remarquez la réalité des adultes n’est guère plus enchantée si l’on s’en tient aux informations. Vous avez entendu parler de ce chercheur fou qui cultive un virus capable de décimer la moitié de la planète ? Je vous conseille l’article, il est terrifiant. A priori le manque de sécurité dans les labo ne relève pas que de la fiction. Resident Evil, World War Z. Si ça continue on va prolonger l’expérience ciné dans la vie réelle. Flippant !
Heureusement, il semblerait que tout ne soit pas perdu. D’autres personnes s’inquiètent de cette nouvelle normalité. Si vous ne le connaissez pas déjà, j’avais envie de vous présenter le nouveau projet en crowdfuding de Mélanie Laurent, un documentaire intitulé Demain. Plutôt que de plomber (encore plus) le moral des gens, l’actrice réalisatrice et son ami Cyril Dion, dirigeant de l’ONG Colibris, veulent « réinventer le monde de demain à partir à partir des meilleures solutions d’aujourd’hui ! » Le message est positif, constructif. On a envie d’y croire. Réenchantons le monde !
Ce n’est pas un signe de bonne santé mentale d’être bien adapté à une société malade. Face à toutes les bizarreries de notre époque, je me revendique de la vieille école parce que « de mon temps » on avait encore de l’espoir que les choses s’améliorent. Un avis sur la question ? 😉
J’adore l’initiative de réenchantement du monde de Mélanie Laurent, je m’en vais mettre ma petite contribution, ils sont à 210% de l’objectif, il y a toujours des gens qui s’engagent, c’est beau 😀
Gandhi disait aussi : « sois le changement que tu veux voir dans le monde »
Joli ! 😀
Je suis de la très « vieille école » et plus j’entends parler de soi-disant solutions pour se sortir de la folie collective plus je me dis que l’humanité est sur une pente savonnée où tout retour à la normalité semble impossible Merci pour ce billet lucide ! Bon dimanche Bisous
Mais non, suis sûre qu’on y arrivera ! Bisous et bon dimanche aussi 😀